Le calme est à son comble, et tu te contentes de te nourrir des quelques pommes achetées un peu plus tôt tout en savourant un jus. Tu voyais, au travers les fenêtres du bâtiment, qui n’est autre que la tour des gardiens, les paysages qu’offrait la région. Tu étais bien seul, après tout, tes autres camarades étaient tous partis s’occuper, pour une mission ou autre. Chacun avait ses petites affaires. Cela ne te dérangeait point évidemment. Quoi de plus agréable que ce silence ? Silence, que tu appréciais tant. Pas tout le monde l’apprécierait, c’est vrai, mais tu fais parti de ces personnes recluses, acceptant avec facilité, la compagnie de la solitude. Et puis au moins, toutes ces pommes n’étaient rien que pour toi ! Cependant, rien ne se passe vraiment comme prévu après tout. Tu entends ces pas, qui dérangent ton calme. Et, si ton regard se tourne vers la provenance de celui qui a brisé le silence, tu ne lui en voudras pas pour autant. Bien au contraire. Xingyun est de retour, aussi inattendu cela est.

Ce kitsune est arrivé à peu près en même temps que toi chez les gardiens. C’est un véritable grincheux, qui n’hésite pas à s’énerver. Oh que oui, il en faut bien peu pour que le renard sorte de ses gonds. Il est sans doute celui qui anime le plus ces lieux. Heureusement, que tu possèdes ce calme sans pareil. La patience que tu éprouves, alors qu’il renverse toute la pièce parce qu’il n’a pas le dernier mot, en est presque à être envié. Et, si, de nombreux points vous différencient, votre duo marche étrangement bien ! Tu éprouves même de l’affection envers lui. Il faut dire, cela fait bien plus de deux ans que vous vous connaissez. Bien, que, tu ne saurais pas véritablement montrer ton affection avec une expression particulière. Alors, oui, tu étais particulièrement inquiet vis-à-vis de son cas. Depuis quelque temps, ses absences sont de plus en plus nombreuses. Et, les fois où il revient, il finit toujours blessé. Tout comme là. Et tu ne sais pas quelles en sont les raisons… Normal que tu t’inquiètes ! Là, se présente l’occasion. Tu te redresses pour te poser à côté de lui :

« Salut Xingyun. Il est rare de te voir ici ces derniers temps...»

Ton ton montre ton calme à toute épreuve. Qui sait comment le kitsune va réagir ? Tu n’arrives pas vraiment à le comprendre malgré tout ce temps. Tu ne sais pas vraiment comment exprimer ta quiétude. Devrais-tu être direct ? Ou bien essayer de le dire de façon subtile ? Quoique… La subtilité risque de ne pas vraiment marcher avec lui. Annoncer clairement ce qui te dérange semble la solution la plus appropriée :

« Je me demande bien où tu vas, pour chaque fois revenir dans cet état. Fais plus attention. Tu es un gardien et souvent nous sommes amenés à former un duo, cela est embêtant si tu es dans un sale état dès le départ. De plus, en tant que camarade, tu vas inquiéter tout le monde.»

Certes, tu avais demandé ce que tu voulais, mais tu fus plutôt indirect quant à ton inquiétude vis-à-vis du renard. Tu avais pris le soin de généraliser le tout, sans dire que c’était surtout toi qu’il inquiétait. Mais, peut-être le diras-tu plus précisément après ses réactions…

Tout vient à qui sait attendre, mais ce n’est pas son cas... Toujours à foncer dans le tas. Jamais le gardien ne prenait le temps de réfléchir et cela ne t’étonnait pas qu’il soit aussi souvent blessé. Néanmoins, cette idée te déplaisait d’une certaine façon. Combattait-il seul de son côté sans en faire part à quiconque ? Peut-être avait-il des intentions bien plus personnelles là-dedans, mais… Oui, tu le connais. Et, sans nouvelles de sa part, tu en reviens à te demander s’il reviendra vivant. Xingyun est trop impulsif, cela pourrait se retourner facilement contre lui. Il peut être facile d’ôter la vie des irréfléchis.

Un soupir s’échappa de tes lèvres. Tu ne voudrais pas perdre un camarade, c’est ce que tu te disais.

Un jour, tu allais avoir les cheveux blancs par sa faute ! Pire, tu en perdrais tes cheveux !

Halloween

La journée n’était pas très avancée lorsque tu regagnas Nirally, dans l’espoir de bientôt, pouvoir te poser afin de te reposer. Tes blessures n’avaient pas totalement guéries, et pour cause, tu ne t’étais pas arrêté des masses depuis ta descente de Snowllia. Les brigands ne disparaissaient pas, les chasseurs plutôt, parce que des criminels, il y en aura partout, toute ta vie durant. Le problème était que les chasseurs pensaient certainement que les Kitsunes étaient plus fragiles en cette période de l’année, mais avec toi dans les parages, c’était totalement faux. Cette dernière semaine, tu n’avais pas chaumé. En plus d’aider ton frère à préparer une cérémonie renarde, tu devais aussi garder le territoire protégé. Tu ne pourrais trouver d’excuses quant à tes actions, tu faisais tout cela pour ton peuple, donc par charité. C’était sans doute une des rares choses pour lesquelles tu te faisais vraiment du souci à l’heure d’aujourd’hui. C’était compliqué pour toi de trouver une véritable motivation pour vivre convenablement ta vie, surtout depuis ce fameux jour …

Tu traversas donc Nirally, faisant une pause de quelques heures dans la capitale, afin de manger un bon bout de viande et de remplir ta gourde d’eau. Histoire que tu ne meurs pas sur la route, ce serait pas mal. Tu n’avais pas peur de la mort, et c’était sans doute ton principal problème. Tu savais que tu trouverais toujours un moyen de t’en sortir, quoi qu’il advienne. En approchant du nouveau Fort des Gardiens, tu te retins de pester. Ta respiration était lourde, ton vêtement écarlate présentait des tâches plus sombres, séchées par le vent et ton voyage, tes cheveux étaient en pagaille … Tu ressemblais surtout à un animal blessé, quasiment mourant en fait. Tu sentis l’odeur de pommes et devina aisément qui se trouvait dans les locaux à cet instant. Tu ne saurais jamais quel goût a la nourriture, toi, qui avais perdu depuis bien longtemps cette sensation délicate sur ta langue. Tout ce que tu sentais lorsque tu mâchais, c’était … Et bien, le goût du vent.

Tu pousses la porte de la Tour, sans trop d’énergie, sans crier comme d’habitude et tu te surpris en train d’apprécier le calme environnant. Avec la même motivation, tu t’affalas sur un des canapés mis à disposition dans le hall. Il était doux, chaud, tout ce dont tu avais besoin. Une odeur familière te rejoignit rapidement, pour te saluer. Un maigre grognement suivit sa remarque. Oui c’était vrai, tu n’étais pas souvent au quartier général des bons et braves gardiens, tu avais bien d’autres affaires à régler pour être tout à fait honnête. Ton grognement voulait dire tout et rien à la fois, tu n’avais pas la force de parler. Tu laissas tes oreilles courir sur la suite de ses paroles. Disait-il qu’il s’inquiétait pour toi ? Non, personne ne se faisait du mouron pour Xingyun l’impulsif. Alors tu compris ses propos comme une manière de t’enfermer quelque part, comme une responsabilité à endosser.

Un fardeau.

Tu bondis sur tes pieds pour le regarder et grogner comme tu ne l’avais jamais fait sur lui auparavant. Dans ton geste brusque, tu ouvris une plaie sur ton abdomen, tu pouvais déjà sentir le sang se répandre sur ta peau chaude tandis que tu t’agitais de colère. Tes cheveux noircis par la saleté ainsi que ton voyage te tombaient sur le visage. Au travers de tes mèches, tu parvenais tout de même à le voir. Tu serras les dents, au point de les faire grincer. La douleur n’était que très peu supportable, tu devais donc passer au-dessus. « FERME LA ! J’AI PAS D’ORDRES A RECEVOIR DE TOI ! » Ton langage laissait à désirer, mais ce n’était qu’une habitude. Cependant, tu n’avais pas pour manie de lui parler de cette manière. Tu reculas de quelques pas, déçu de toi-même, de ne pas pouvoir contrôler cette impulsivité. Tu étais stupide, et ce n’était rien de le dire. « TU M’EMMERDE LÂCHES MOI ! » Quelques gouttes de sang tombèrent sur le sol, mais ton attention était dirigée vers Lucian, et tes grognements étaient également pour lui.

Halloween

Est-ce que tous les kitsune grognent en permanence ainsi ? Oh non, tu le savais, c’était juste un trait de caractère de ton camarade. Tu ne savais pas, ce que ces bruits voulaient dire. Peut-être en soit, il n’y avait pas de significations particulières. Il est difficile de le comprendre celui-là…. Ce ne sont peut-être que des tics, des réflexes qu’il fait, parce que son caractère est bien impulsif. Pourtant, il était bien rare qu’il grogne ainsi vers toi. Sa voix brise le silence avec puissance. Il te dit de te la fermer, qu’il n’a pas à recevoir d’ordres de ta part. Après ce geste si brusque, il finit par reculer avec mécontentement te demandant de le lâcher car tu l’emmerdais.

Tu lui avais donné des ordres ? Cela te semblait étrange. Très étrange. En réalité, tu t’étais peut-être trompé avec tes mots, pourtant, tu avais essayé de lui dire que tout le monde s’inquiétait pour lui. Pas assez explicite peut-être. Comme tu n’es pas très sociable, tu sais parfaitement que tu peux avoir de nombreux défauts dans tes mots. Lorsqu’on n'est pas habitués aux autres, il est difficile de communiquer, et, surtout de dire ce que l’on ressent. S’exprimer, c’est plus compliquer qu’on le croirait. Parce que les autres peuvent les prendre d’un tout autre point de vue. Ce qui venait tout juste de se passer. L’ambiance avait bien chuté, n’est-ce pas ? Xingyun avait pris tes paroles dans un point de vue différent du tien, et, dans son mauvais caractère, il n’avait pu que s’exprimer dans une colère froide et incompréhensible à tes yeux. Tu ne savais pas comment prendre sa réaction. Jamais il n’avait agi avec toi. Pourtant, tu continuas, de rester calme. Heureusement que tu étais parmi les gardiens n’est-ce pas ? Tu es, si extérieur à ce genre de situations. Tu sais parfaitement passer outre de son rugissement étrange. Et, si tu voulus te rectifier pour qu’il comprenne que, loin étaient tes intentions d’ainsi l’énerver, quelques gouttes de sang attirèrent ton attention.

Ces tâches rougeâtres, se déposant sur le sol, venaient de l’abdomen de ton camarade gardien. Rapidement, tu compris, que le jeune kitsune, s’était rouvert une blessure, comme dans ses folles habitudes. Pourtant, il n’en avait que faire. Insouciant. Il n’y avait pas d’autres mots pour le décrire :

« Xingyun, tu saignes. Il faut soigner ça vite avant que cela empire. »

L’inquiétude que tu portais à son égard, était illisible dans ton regard. Sur ton visage, ton expression restait neutre. Et peut-être, que cela pouvait aussi porter à confusion ton compagnon. Lorsque l’on voit, ton visage impassible, on ne peut savoir ce que tu penses. Il est impossible, de comprendre ce que tu ressens et de ce fait, tes mots, n’en paraissent que vide de sens. Neutres. Alors, qu’au plus profond de toi, tu cherches à t’exprimer, mais, là est toute ta difficulté.

N’ayant aucune capacité pour le soigner avec un bâton. Tu ne pouvais que te hâter, en cherchant les quelques matériaux nécessaires pour soigner le renard enragé. Dans ce lieu, il est aisé de trouver des bandages ou des soins, car, dans ce groupe, il est aisé de se blesser. Face à lui, avec les bandages, pommades et tout le nécessaire, tu les déposes alors sur le canapé :

« Assis-toi s’il te plaît, ce sera plus pratique. »

Tu te rendis vite compte. Que ta façon, de parler allait lui déplaire. Il n’aime pas l’aide des autres n’est-ce pas…. Qu’importe, tu ne pouvais pas le laisser dans cet état :

« Laisse-moi t’aider. Seul, ce n’est pas très efficace pour soigner une blessure à cet endroit. »

Ton regard se porte sur lui. L’hybride s’énerve toujours pour un rien. Il est ton opposé direct. Tu as dû mal à le comprendre, mais, lui aussi doit avoir du mal à te comprendre. Tu agis ainsi juste parce qu’il est un gardien et qu’il doit donc effectuer son devoir. Peut-être était-ce plutôt de cette manière-là, qu’il voyait ton comportement.

Le sang continuait de couler.

Ce n’était pas cela. Loin de là. Un camarade est un camarade. Tu ne souhaites juste pas le voir mourir car tu l’apprécies. Alors pourquoi voit-il tout de travers ? Il fallait que cela cesse alors, c’est dans ta douce voix, calme et inébranlable que tu lui dis :

« Écoute Xingyun. Je m’inquiète pour toi. Il faut que tu fasses plus attention, cela pourrait t’être fatal un jour. »

Il n’a pas peur de la mort. Tout comme toi, tu vis dans le risque, mais, si c’est pour protéger les autres, mourir en serait un honneur. La fin vient pour tous, elle n’est que l’aboutissement d’une vie. Mais tu redoutes la mort de tes compagnons. Tu redoutes sa mort.

Halloween

Le visage inexpressif de Lucian, ses traits calmes, te laissaient souvent perplexe. Tu ne savais jamais à quoi il pensait réellement, ce qu’il voulait dire lorsqu’il sous-entendait des paroles. Ici, avec la fatigue, ta blessure, ton manque de stabilité émotionnelle relative à ton voyage et tes nombreux allers et retours, tu avais réagi au quart de tour. Tu avais peur, souvent effrayé que l’on te regarde comme Lucian t’observait, comme un élément inutile, que l’on n’ait pas besoin de toi. Tu ne voulais pas apercevoir cette lueur déçue dans les yeux de quelqu’un qui te fixait, parce que tu l’avais vu trop de fois dans le regard de Liuxing. Tout ce qui t’importait aujourd’hui, c’était de vivre une vie mouvementée par des combats et de l’adrénaline. Si tu n’avais pas rencontré le Prince d’Uxy, jamais tu n’aurais rejoint les Gardiens, tu aurais continué à faire des contrats ci et là pour gagner ton pain, mais tu n’aurais pas été plus loin.

Alors que tu continuais de grogner sur Lucian, il te fit la remarque que tu saignais. Tu fronças les sourcils, baissas les yeux sur le sol pour apercevoir des gouttes de sang, ton abdomen se contracta et tu couinas silencieusement en ressentant la douleur. Si tu ne l’avais pas sentie jusque-là, maintenant que tu la voyais, elle était comme insoutenable. Tu regardas de nouveau ton interlocuteur, pour te confronter à cet air toujours aussi impassible. Tu ne cessas pas de grogner malgré tout, le regardant aller quelque part pour chercher de quoi te soigner apparemment. Tu n’avais pas envie, tu ne voulais pas qu’on te touche, tu n’aimais pas ça. Tu n’en avais pas l’habitude, les seules personnes qui soignaient tes blessures, qui pouvaient t’approcher à ce point, étaient les deux femmes de ta famille, ta Mère et ta Sœur Cadette. Alors qu’il te demanda de sa voix calme de t’asseoir auprès de lui pour que ce soit plus facile, tu reculas d’un pas, campant sur tes positions. Tu ne bougerais pas, tu pouvais être plus têtu que n’importe qui à la caserne, alors non, tu ne ferais aucun mouvement.

Alors tu ne pourrais pas te soigner tout seul ? C’était ce que vous alliez voir. Tu l’avais déjà fait, de nombreuses fois, et généralement avec … des feuilles ou du tissu sale. Tu avais eu de la chance qu’aucune de tes blessures ne s’infecte, sinon tu serais mort depuis longtemps. Ton sang de Kitsune devait être assez solide, parce que tu avais de nombreuses cicatrices un peu partout sur le corps. Avec le temps, certaines s’effaçaient, d’autres plus profondes, restaient marquées. Alors que tu allais lui crier dessus encore une fois, ses derniers mots furent comme un électrochoc. Tu t’arrêtas net, ta respiration se coupa quelques secondes, tant par la douleur que par la sincérité de ses propos. Tu baissas les yeux, pour apercevoir le sang. Ton sang. Ce n’était pas la première fois que tu le voyais, il ne te faisait plus aucun effet.

Tu fronças une fois de plus tes sourcils avant de saisir le matériel qu’avait posé Lucian sur le canapé, tu te mis dans un coin, activant le mode rage boudeur, et t’assis en tailleur dans un coin de la pièce, non sans une grimace de douleur. Tu commenças à délier l’attache de ton immense combinaison rouge. Tu ne voulais causer du tord à personne, tu t’occuperais de tes plaies toi-même, tu n’avais besoin de personne. Tout comme personne n’avait réellement besoin de toi. Tu fis glisser le tissu sur ton épaule d’abord, pour ensuite totalement le baisser et libérer ton bras, tu serras les dents, tes mouvements provoquaient des ondulations de ta peau, et ces dernières couraient sur ton corps comme de vils serpents. Tu pris d’abord un bandage, que tu arrachas avec tes dents, pour l’humidifier avec du produit dont l’odeur ne te plaisait pas du tout. Tu posas le tout sur ta plaie. Et voilà. Tu adressas un regard à Lucian, comme pour lui dire « Content ? » puis détournas ton attention pour continuer de bouder dans ton coin.

Halloween

Jamais il ne semble s’arrêter de grogner. Le kitsune est têtu. Beaucoup trop têtu. Tu ne saurais dire, si son comportement en était presque aussi puéril que celui d’un enfant. Mais, tu n’avais que faire de tout cela au final. Ne pouvant que constater son mécontentement habituel. Lui, c’est un gardien pas comme les autres. Lui, il se démarque. Parce qu’il a ce caractère. Ce sale caractère qui le définit. Mais, que tu ne peux pas détester. Qu’est-ce que tu détestes de base ? Pas grand-chose. Tu es un esprit bien trop simpliste, ou bien trop lunaire aussi. Alors, même si tu lui proposais de l’aide pour le soigner. Il se résignait. Refusait avec simplicité. Xingyun est indépendant. Il est un animal en liberté, qui se complaît à vivre dans le mouvement des combats et cette adrénaline qui rend sa vie bien souvent en danger. Il semble manqué de jugeote. Il se blesse, s’énerve, et ce n’est lorsqu’il la remarque, que la douleur en devient insupportable. Son comportement est mauvais pour lui. Tu t’inquiètes pour ton camarade. Au moins, tu pus remarquer, que tes mots l’avaient faits réagir. Cependant, tu ne savais pas dans quel sens. Tu ne pouvais rien ajouter, celui-ci, s’éloignant avec les matériaux de soin pour s’occuper de sa blessure seul. Et, lorsqu’il eut fini, son expression te demandait clairement si tu étais content. Dans un silence, il finit juste par bouder dans son coin.

Décidément… C’est un enfant.

Tu ne savais pas vraiment comment agir. Que ce soit avec lui ou avec les autres. Tu demeurais aussi dans un silence. Et l’ambiance n’en était que étrange. Tu souhaitais lui faire comprendre qu’il devait faire plus attention. Mais il agissait comme un sourd ou un animal enragé. Le kitsune est si différent de toi. Cependant, il est surtout ton partenaire. Tu serais capable de le considérer comme un ami ? Pas encore sûr. Comment agir ? Tu doutes trop là-dessus. Ton comportement pouvant ne pas être bien compris. Comment t’entretenir avec lui ? Après une réflexion, tu décides de prendre deux pommes. Une, se déposant devant lui, l’autre, que tu finis par croquer à pleine dent :

« Tu veux bien arrêter de faire la tête ? »

Donner une pomme pour essayer de se réconcilier… Oui, c’était bien ton genre. Tu es simpliste. C’est tout. Bien que, tu n’avais strictement rien à te reprocher. Bien au contraire. Pourtant, tu te demandais si tu n’avais pas fait quelque chose qui l’avait incessamment énervé. S’il avait quelque chose contre toi. Même si le Kitsune pouvait comprendre le sens de ton geste pure et simplet, pas sûr qu’il réagisse comme tu le désires. Non. Il est trop… Lui ? Oui. Trop lui pour agir ainsi. Mais l’espoir fait vivre comme on dit. Tu ne voulais pas abandonner. Il fallait régler cette situation. Que tu agisses ainsi juste parce que ton coeur est d’un naturel gentil. Ou parce que cela pourrait être embêtant pour ta prochaine mission. Peu importait. Ta détermination invisible était là.

Ton regard est impassible. Imperturbable. Peu importe les paroles que tu dégages :

« Si tu as des problèmes tu devrais en parler. Je suis là pour t’écouter. »

Car tu es une personne à l’écoute. Car tu es là pour les autres. Si tu étais bien plus expressif et plus sociable. Tu ressemblerait presque au gardien parfait. Celui qui protège la population dans une grande gentillesse, un courage sans fin et un sourire immaculé.

Toi il te manque le sourire.

Lui, beaucoup de choses. Mais, l’hybride n’est pas méchant, tu le sais bien.

Halloween

Tu étais idiot. Tu ne te le disais pas assez souvent, mais tu avais un caractère merdique. Tu ne laissais personne t’approcher, et pourtant, malgré ton comportement plus que discutable, tu attirais les gens. Il n’y avait qu’à regarder Tadase. Pourquoi il t’avait recruté. Qu’est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête pour qu’il décide de te faire entrer dans les Gardiens. Et par quelle magie avait-il pu te persuader que c’était la meilleure chose à faire. Parce que tu n’avais pas hésité longtemps avant de dire oui, de peser le pour et le contre, et de voir en cette proposition des pour plutôt convaincants. Et aujourd’hui, tu étais là, dans le nouveau bastion des Gardiens, en train de faire ton têtu, de vouloir montrer que tu savais te débrouiller tout seul. C’était vrai, en grande partie, mais tu étais sans doute trop inconscient pour te rendre compte que la mort te suivait à la trace. Tu étais aussi aveugle pour ne pas voir que des gens s’inquiétaient réellement pour toi et que … On pourrait être triste si jamais tu ne revenais pas. Non, ça, tu n’y pensais même pas. En fait, ce n’était même pas concevable.

Alors après avoir lancé un regard « t’es content » à Lucian, tu tournas la tête vers le mur, pour bouder encore et toujours. Tu te coupas quelques instants du présent pour reposer ton cerveau et essayer de ne pas ressentir la douleur de l’alcool sur ta plaie. Inutile de t’inquiéter pour cela, tu avais connu bien pire que cela. Un flash te revint alors, le camp des chasseurs de Polymorphes, le petit homme aux cheveux bleus, et puis … Le reste. Tu fermas les yeux, pour ne plus voir toutes ces images d’horreur, pour essayer d’oublier les odeurs de sang et de poison, et puis ta cécité temporaire. Un cauchemar que tu avais vécu éveillé.

Lucian te tira de cette horreur en posant une pomme devant toi, alors qu’il en croquait une autre. Les bras croisés, tu dirigeas ton regard vers lui, ton regard exprimant une certaine confusion. Tes pensées précédentes t’avaient presque fait oublier que tu étais de retour chez les Gardiens et que Lucian avait voulu te soigner. Tu soupiras, et pris la pomme dans ta main aux griffes aiguisées. Tu plantas tes dents dans la chair fraîche et juteuse du fruit, appréciant ce petit moment de répit. Tu n’avais pas le goût de ce que tu mâchais, mais cela te procurait tout de même un sentiment de douceur, un peu de douceur pour ton âme meurtrie. Tu poussas un léger soupir, tu semblais légèrement calmé, même si au fond, tu ne pouvais pas non plus oublier d’être toi-même.

« J’suis pas un enfant, et j’ai rien à dire. » Tes sourcils froncés, tu continuas à manger la pomme qu’on t’avait donné. Tu aurais préféré un morceau de viande, l’odeur t’aurait sûrement fait du bien. Ton corps était affaibli par les récents événements, tu avais besoin de repos, tu n’étais pas certain de pouvoir te lever pour être tout à fait honnête avec la situation.

« Et y a pas b’soin de s’inquiéter … » Tu bafouillas ces derniers mots tellement doucement que tu ne savais pas s’il avait entendu. Tu étais un peu gêné qu’on puisse s’inquiéter pour toi, tu étais trop fier pour accepter de l’aide en réalité, tu étais trop têtu pour estimer que quelqu’un pouvait réellement se faire du sang d’encre.

Halloween

Son regard exprimait une certaine confusion. Tu ne savais pas pourquoi. Et, sans doute, tu n’avais pas à le savoir. Le kitsune n’apprécierait pas que tu lui fasses la remarque. Peut-être qu’il nierait tout ? Sans aucun doute. Pourtant, après un soupir, il fit un geste qui te soulagea. Pour toi, constater qu’il avait accepté cette pomme, c’était un peu comme s’il te disait qu’il arrêtait de te faire la tête. Non ce n’était pas aussi simple que cela, Lucian. Au moins, il avait arrêté de grogner. C’était une bonne chose. Et, si jamais celui-ci montre quand même son mécontentement en insinuant qu’il n’est point un enfant et son expression digne d’un boudeur colérique… Il semblait calmé et c’était appréciable de le constater. Puis, tu entendis une dernière phrase. Sa voix avait perdu de l’ampleur comparée à d’habitude. Comme s’il avait un peu bafouillé ses derniers mots. Néanmoins, au vu de l’attention que tu lui portais. Cette phrase ne t’avait pas échappé. Et celle-ci, te fit croquer de façon un peu plus forte dans ce pauvre fruit rouge. Ce fruit du péché.

Il n’y avait pas besoin de t’inquiéter ?

Tu ne savais pas exprimer tes émotions. Tu ne ressentais pas vraiment d’émotions à vrai dire. Mais bon. Une chose était sûre… C’est que tu ne pouvais pas approuver ce qu’il avait dit. Tu le vois très bien. Il y a toutes les raisons de s’inquiéter pour lui. Le gardien est assez irresponsable. Le gardien est têtu. Il fonce trop dans le tas. Il disparaît et revient avec pleins de blessures. Et après, il n’y a pas de quoi s’inquiéter ? Un long soupir t’échappe :

« J’ai toutes les raisons de m’inquiéter vu comment tu finis toujours blesser. »

Mais après tout. Le renard ne semblait pas vraiment vouloir de l’aide des autres. Par fierté ? Tu avais tu mal à comprendre ce mot. Qu’est-ce que la fierté apporte après tout ? Ce concept t’était étranger. Tu étais peut-être trop… Toi pour comprendre tout cela. De nouveau, tu croques dans la pomme, sentant ce doux parfum. Ah, il n’y a vraiment rien de meilleur pas vrai ? Ce que c’est délicieux. Ce petit goût sucré. Un véritable délice. Du moins à tes yeux. C’est que tu as un véritable délire avec les pommes et daïkons. Mais, sans doute que ton camarade, lui, aurait préféré un truc plus gros ? De la viande peut-être. Enfin… Tu n'allais pas vraiment t’en rendre compte de cela… Finalement, tu te dis, qu’il faudrait peut-être que tu lui fasses comprendre qu’il peut compter sur toi ? Qu’il n’a pas besoin de combattre tout le temps seul. Vous êtes camarades ! Ton regard se plonge alors dans le sien :

« On est coéquipiers, alors tu devrais un peu plus compter sur moi. Tout comme moi, je compte sur toi. »

Tu te retins de parler de fierté. Tu ne savais pas si c’était une des raisons pour laquelle Xingyun refusait tant l’aide des autres. Et peu importe au final. Dans tous les cas, y avait des chances que ça lui déplaise si tu en parlais. Et vu qu’il s’était calmé. Fallait rester prudent.

Mais l’hybride est imprévisible. Tu ne pouvais qu’espérer, que tout reste aussi calme. Que l’enfant reste calme. À bien y penser… Si cela continuait ainsi… Bientôt, tu allais te comporter comme un papa protecteur avec son gamin chiant et têtu.

Si ce n’était pas déjà le cas.

Halloween

Tu terminas rapidement cette pomme que Lucian t’avait offerte. Après tout, tu ne sentais rien sur ta langue, alors pourquoi traîner ? De plus, tu avais faim, tu étais fatigué, et tu commençais à ressentir des picotements sur ta peau blessée. Tu n’avais pas le temps de te plaindre, tu devais agir, sans réfléchir, pour survivre, même si tu étais dans un sale état. Tu ne pouvais pas continuer comme cela, tu devais changer un peu, mais tu n’y arrivais pas. Tu avais peut-être des tendances hyperactives parce que tu ne pouvais pas juste rester sans rien faire plusieurs heures d’affilées. Tu entendis alors les dents de Lucian percer un peu plus fort la chair tendre du fruit, puis vint un soupir. Un soupir las, désespéré. Quelque chose comme ça. Tu gardas donc ta salive pour balancer plus tard des paroles qui piquent, qui font lever les yeux au ciel, qui font soupirer encore plus. Tu n’avais plus d’énergie soudainement, tu pourrais sans doute t’endormir dans cette position assise.

Tu croisas par la suite son regard, tu plongeas tes iris dorés dans les siens, d’un bleu qui te rappelait la chevelure de l’algue vivante que tu avais rencontrée dans l’épisode précédent de ta vie. Tu devais être fatigué, vraiment épuisé, autant ton corps te disait de te la fermer et de rester tranquille, autant ton cerveau te hurlait de dormir sur-le-champs. Tu continuais de fixer ton camarade Gardien dans les yeux, sans pour autant afficher un air présent. Même ses mots semblaient te survoler comme une mélodie qui incitait au sommeil. Pourtant, quelque part, une petite voix te disait qu’il avait peut-être raison.

Tu restas alors dans ce silence confortable quelques instants, avant de te déplacer. Tu passas de position assise boudeur, à position couchée sur le côté, un bras tenant ta tête, les yeux fermés, les oreilles bougeant en fonction des bruits environnants. C’était relaxant cet endroit en fait, tu ne l’aimais pas parce qu’il était trop loin de tout, trop près des Sans-Visages, mais au final, là, maintenant, tu appréciais la quiétude que cela t’offrait. « Je ne peux pas compter sur tout le monde, ce serait comme avoir un animal de compagnie, je peux pas en prendre soin. » Tu parlais lentement, la fatigue pesant grandement sur ta voix, et le ton de ta voix adoucie par la même occasion. Tu avais l’habitude de t’endormir partout, n’importe quand, sous la neige ou sur des lattes de bois.

Lucian n’était pas un danger pour toi, tu ne risquais rien si tu t’endormais comme ça, avec lui en face. Bien au contraire, sa présence te permettait de te détendre. Sans nul doute que ses paroles te faisaient du bien, malgré ce que tu laissais apparaître. Il était inquiet, et même si tu n’admettrais jamais que cela touchait ton coeur couvert de roche dure, c’était réconfortant. Si un jour, tu disparaissais, quelqu’un se souviendrait de toi.

Halloween